Début octobre 2022, la plateforme de streaming Netflix ajoutait un film interdit aux moins de 18 ans : American Girl. Les avis sur ce titre étant assez controversés et le sujet très lourd, ce film méritait d’être visionné. Porté par Mila Kunis et inspiré d’une histoire vraie, il raconte la quête de reconstruction d’une jeune femme après plusieurs traumatismes au cours de son adolescence. 5 ans après le lancement du phénomène #MeToo, voici l’histoire d’Ani FaNelli.
New York 2015, Ani (Mila Kunis) est sur le point de se marier avec Luke Harrison IV (Finn Wittrock). Cette jeune femme aux tenues hors de prix est rédactrice spécialisée dans les articles sur le plaisir masculin pour le magazine estampillé sexe et mode Woman’s Bible. Elle a tout pour être heureuse et aspire à avoir une colonne dans le New York Times Magazine. Elle est contactée par un réalisateur qui souhaite tourner un documentaire sur la fusillade de Brentley School qui a eu lieu en 1999. En effet, Ani est l’une des survivantes d’une des pires tueries des U.S.A.
En attendant, je fais semblant d’être importante
Luckiest Girl Alive est le titre original de ce film. Titre qui matcherait très bien avec le début de ce film car oui Ani pourrait être la femme la plus chanceuse du monde. Mais elle dissimule de terribles secrets. Par le biais de la voix off d’Ani, on découvre très rapidement qu’un mal la ronge. Elle cache en elle colère, troubles alimentaires, angoisses ou encore visions psychopathes.
Ils avaient tous quelque chose que je n’avais pas : un pédigrée
Dans des flashbacks de 1999, nous rencontrons Tifani FaNelli (Chiara Aurelia), jeune lycéenne issue d’un milieu modeste qui intègre le prestigieux lycée de Brentley School pour avoir une chance de pouvoir s’inscrire plus tard dans les plus grandes universités. Elle va faire la connaissance de plusieurs élèves dont Dean Barton, Peyton Powell et Liam Ross et va se lier d’amitié avec Arthur Finnerman et Ben Hunter.
“Le passé ne meurt jamais. Ce n’est même pas le passé.”
Lors d’une soirée alcoolisée chez Dean, Tifani reste seule avec Liam, son petit-ami, Peyton et Dean. Elle subit alors un viol collectif par ces trois derniers. Elle réussit à s’enfuir et trouve réconfort auprès de son professeur, M. Larson. Il lui conseille de porter plainte et l’accompagne dans le bureau du proviseur pour qu’elle se confie. Cependant, lorsque ce dernier lui explique qu’il est obligé de prévenir sa mère, elle refuse et change d’avis. S’ensuivent harcèlements, humiliations et moqueries de la part des trois adolescents. Elle se confie à ses amis Ben et Arthur et apprend par la même occasion que Ben a lui aussi été agressé par Peyton. Arthur ne ménage pas sa colère face à ses amis refusant de se battre contre ces “intouchables” du lycée.
Parfois je me sens comme une poupée mécanique. Tournez la clé et je vous dirai exactement ce que vous voulez entendre
La Ani de 2015 accepte de rencontrer le réalisateur du documentaire. Lors de cet entretien, il lui annonce que Dean souhaite la rencontrer et qu’en échange de cette rencontre, il reviendrait sur ses déclarations passées ce qui la disculperait de l’accusation de complicité. Elle explique que ce dernier l’a violée et pour cette raison, elle refuse de le rencontrer mais souhaite quand même témoigner pour le documentaire. Face à la caméra, aidée de sa voix intérieure qui lui dicte l’attitude à avoir, elle relate ses souvenirs de la fusillade.
Je veux que la vérité sorte, c’est tout ce qui m’importe
1999, Brentley, alors que les élèves sont dans le lycée, une explosion retentit. Armés de colère et de fusils, Ben et Arthur se vengent de leurs douleurs et tirent sur tout ce qui se dresse sur leur passage. Ben reconnaît Tifani et la salue, acte qui sera retenu par les survivants comme une possible complicité. Dans la terreur et la fuite, elle prendra la décision de ne pas aider un de ses violeurs. Toujours dans sa fuite, elle se retrouve face à Dean, blessé, qui lui demande de l’aide. Arthur les retrouve et, en la traitant de lâche, lui propose de tuer son autre violeur. Elle prend une décision qui va la hanter le reste de sa vie…
Accueillie comme une pestiférée lors des funérailles des élèves tombés pendant cette tuerie, Ani apprend que pour se couvrir, Dean a menti sur toute l’histoire et l’a fait passer pour une complice. Aucune charge ne sera retenue contre elle mais elle restera encore deux ans à Brentley… deux ans de solitude… Mais lors d’un voyage scolaire à New York, elle va avoir une révélation : une femme qui haussait le ton, qui ne se laissait pas faire, qui pouvait s’acheter des robes hors de prix, qui fendait la foule et qui fonçait droit devant elle dans les rues de New York avec un pas déterminé qui semblait dire “je suis plus occupée que vous” … Adieu Tifani FaNelli, bonjour Ani Harrison.
Dean allait passer sa vie dans un fauteuil roulant, qui allait le traiter de menteur ?
En 2015, Dean Barton est un grand militant anti-armes et auteur adoré de tous, ce qui, face à une petite journaliste sexo, le rend bien plus crédible. Mais Ani va se confronter à lui en tête à tête et va obtenir ce que toute victime de viol souhaite… Avec cette arme en main, elle est prête à ce que sa vie prenne un autre tournant, celui de la vérité et de la reconstruction.
Ma colère est comme du monoxyde de carbone : elle n’a ni goût, ni odeur et est on ne peut plus toxique. Mais il n’y a que moi qu’elle empoisonne
La réalisation bien ficelée signée Mike Barker met en place progressivement l’histoire grâce à des flashbacks qui permettent de découvrir les causes de ce mal-être secret. On retrouve une Mila Kunis extraordinaire dans ce rôle. Une femme aux traits froids et hautains qui cachent une profonde douleur. La voix off joue un rôle important pour comprendre la complexité et la souffrance du personnage. Le tout est accompagné d’une bande originale composée par Linda Perry. Légère dans les moments présents mais lourde et oppressante pendant les flashbacks, elle se marie parfaitement avec le film.
American Girl est inspiré du roman de Jessica Knoll, Luckiest Girl Alive, livre aux inspirations autobiographiques puisque l’auteur a révélé avoir été victime de viol collectif en 1999 à l’âge de 15 ans. Donner naissance au personnage d’Ani a été un exutoire pour apaiser sa colère.
L’avis de la rédaction
Ce film aux allures de la série 13 Reasons Why aborde, comme la série, le thème du viol et de la violence. Cependant le sujet y est traité de manière différente, la façon dont l’entourage fait culpabiliser la victime a une place importante dans le film. Le silence que ces femmes se sentent forcées de garder pendant des décennies parfois car elles savent que face à leurs agresseurs, elles n’ont aucune chance d’être prises au sérieux. Les auteurs de violences sexuelles sont défendus car ils sont plus “puissants” que leurs victimes.
American Girl a su créer la polémique par son aspect choquant et surtout par son message : “Vous n’êtes pas seules”. Il mérite d’être visionné pour aider à comprendre certaines victimes.
Je ne l’ai jamais dit, même pas à mon mari
En France, une estimation a été faite de 9 agressions sexuelles par heure et toujours selon ces estimations seulement 12% des victimes portent plainte. Ce ne sont que des estimations car combien de victimes gardent le silence ? Chaque victime réagit de façon différente mais le jugement et la culpabilité peuvent mener à une destruction, une autodestruction. Il existe de nombreux moyens pour aider les personnes qui en ont le besoin, mais là encore chaque cas est unique. Si vous êtes témoin, victime ou proche de victimes ne l’oubliez pas mais soyez présents. Vous pouvez également vous rendre sur le site des associations de préventions et de lutte contre les violences sexistes et sexuelles.
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